Le Parlement européen a adopté, ce jeudi 13 février, une résolution exigeant la suspension immédiate du partenariat stratégique entre l’Union européenne et le Rwanda sur les matières premières. En cause : le soutien présumé de Kigali aux rebelles du M23, un groupe armé actif dans l’Est de la République démocratique du Congo (RDC).
Le protocole d’accord entre l’UE et le Rwanda sur les chaînes de valeur durables, signé en février 2024, visait à renforcer la coopération en matière d’approvisionnement en matières premières stratégiques, essentielles notamment à la fabrication de produits électroniques. Cependant, cet accord a rapidement suscité la controverse en RDC, où le président Félix Tshisekedi l’a dénoncé comme une incitation au « pillage » des ressources congolaises.
Les autorités congolaises accusent depuis plusieurs années Kigali de soutenir activement le M23 pour s’approprier les richesses minières de l’Est du pays, notamment le coltan et l’or. Cette rébellion, réactivée depuis 2021, est responsable de violences meurtrières et du déplacement de centaines de milliers de civils.
Face à ces accusations, les eurodéputés ont adopté une position ferme. Dans sa résolution, le Parlement européen demande à la Commission et au Conseil de l’UE :
- De geler immédiatement le protocole d’accord avec le Rwanda sur les matières premières.
- De suspendre toute aide budgétaire directe et assistance militaire à Kigali.
- D’exiger le retrait des troupes rwandaises du territoire congolais.
Cette décision envoie un message fort, indiquant que l’Europe ne peut pas tolérer une coopération économique avec un État impliqué dans un conflit armé et accusé d’exploiter illicitement des ressources naturelles au détriment de la souveraineté d’un pays voisin.
Ce bras de fer entre l’UE et le Rwanda intervient dans un contexte régional déjà extrêmement tendu. Depuis plusieurs mois, les combats entre le M23 et les forces armées congolaises (FARDC), soutenues par des groupes d’autodéfense locaux, se sont intensifiés. Malgré les appels internationaux au cessez-le-feu, les affrontements se poursuivent, exacerbant une crise humanitaire alarmante.
Par ailleurs, la question des « minerais de conflit » est au cœur des préoccupations internationales. De nombreuses ressources extraites illégalement en RDC sont utilisées dans la fabrication d’appareils électroniques vendus en Occident. L’UE, qui prône des chaînes d’approvisionnement éthiques, est désormais confrontée à la nécessité de revoir ses engagements économiques dans la région.
Si la Commission européenne applique les recommandations du Parlement, les relations entre l’UE et le Rwanda risquent de se détériorer considérablement. Kigali, qui a toujours nié toute implication dans le soutien au M23, pourrait réagir en se tournant vers d’autres partenaires, notamment la Chine et la Russie, déjà très actifs dans la région en matière d’exploitation minière.
De son côté, la RDC, qui plaide depuis des mois pour des sanctions internationales contre le Rwanda, pourrait voir dans cette décision un soutien diplomatique de poids. Cependant, la mise en œuvre concrète de ces mesures dépendra de la rapidité avec laquelle la Commission et le Conseil de l’UE réagiront à la résolution adoptée par le Parlement.
En attendant, les populations de l’Est congolais continuent de payer le prix d’un conflit alimenté par des intérêts économiques et géopolitiques majeurs.